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Aux fils de Lau
9 février 2011

Mais qui est vraiment le boulet ?

Bon... voilà 24 heures chrono (puf puf puf... blague nulle pour donner le ton) que je n'arrive pas à trouver le temps de vous présenter ma dernière née. Il n'y a pas si longtemps, je me serais raconté  que c'était un strict manque de temps, comme un léger défaut d'organisation, ou l'expression d'un furieux sens des priorités, si ce n'est que depuis un mois et demi, j'ai vécu une expérience traumatisante qui m'a fait prendre conscience de bien des choses...

Vous voulez vous connaître ? Vous envisagez de consulter, peut-être même de tenter la grande aventure de la psychanalyse... Laissez tomber. Essayez plutôt la S du Stylish Dress Book 3 en version passepoilée. Mais attention : vous ne savez pas où cette expérience peut vous mener...

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Bref. Si j'ai du mal à poster mon sujet sur la fameuse chemise-boulet (ben oui, "fameuse" vu qu'il y a bien 10 personnes qui en ont entendu parler, et je ne compte pas mon mari qui considère depuis peu la couture comme un équivalent des sept plaies d'Egypte réunies...), c'est parce que cette chemise est maudite (si si... comme on va le voir), parce que j'aurais aussi bien pu titrer ce billet Beaucoup de Bruit Pour Rien (mais ce plagiaire de Shakespeare l'a fait avant moi, juste pour me contrarier), et parce qu'histoire de me dégoûter de la vie, des chemises passepoilées plus belles les unes que les autres fleurissent partout depuis quinze jours, et particulièrement depuis lundi... Visez plutôt ici, ,... Et je ne vous parle même pas de Madame la Poule qui nous sort, pile poil le jour où j'achève à peu près de gravir mon Everest, une petite chemise passepoilée style "oh-j'ai-fait-ça-comme-ça-pour-m'occuper-les-doigts-entre-un-pull-irlandais-improvisé-et-je-ne-sais-quoi-de-sublime"... mais bon, en même temps, c'est la Poule, hein, ça compte pas ! (je suis sûre que cette fille a conclu un pacte avec le diable : l'immortalité, des doigts de fée et des journées de 72 h. contre la recette des muffins à la papaye, ou un truc comme ça... Sûre, j'vous dis !) De quoi se retrouver totalement inhibée...

D'ailleurs, c'est elle, la coupable... Si si, j'en ai assez de me taire, de souffrir en silence, comme tant d'autres qui pleurent sur leur MAC, le soir, à la veillée, un oeil sur un ouvrage abandonné, un autre sur l'écran de l'ordi, le dernier sur la corde déjà nouée pour la pendaison (ça fait trois yeux ? vous voulez vraiment me contrarier, vous aussi ?!)... Allez donc voir ce qu'elle nous a fait, la Poule, à partir du modèle S en question : ça, ça, ça... je m'arrête là. Envie de pleurer.

J'ai donc été faible. J'ai blasphémé. J'ai voulu faire ma poule... et me voilà calmée !

Vous voulez les détails, un historique, et le pourquoi du comment j'ai économisé dix ans de psychanalyse ? En voiture Simone ! On y va...

"Au commencement était le verbe" a dit la Bible. Et c'est pas faux. Perso, au commencement, j'ai surtout trouvé le blog de la Poule sus-citée, et le Stylish Dress Book. La chemise par laquelle tout est arrivé, c'est celle-là :

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Sur les images, et cela n'a échappé à personne, la chemise est courte, plutôt carrée, un peu évasée vers le bas... les manches courtes produisent un effet moyen... Il s'agissait donc d'apporter de subtiles modifs. Comme les "copines", j'ai donc :

- rallongé la chose de 5 cm (il en aurait fallu 10 ou 15, facile !)

- inventé des manches longues avec un poignet boutonné, totalement en free style (un conseil : utilisez un patron ! Cela vous évitera des manches trop courtes, un peu étroites...)

- descendu vers l'avant l'empiècement du haut du dos. En fait, j'ai décalqué mon patron comme il se présente puis j'ai mis bord à bord les pièces en papier qui correspondent à l'empiècement dos et au devant. J'ai scotché les deux puis découpé le devant un peu plus bas pour que la couture de l'épaule soit, en fait, au niveau du bas du cou. L'idée était que cette couture, passepoilée, soit plus visible. Je ne sais pas si c'est très clair...

- ajouté ce f*** passepoil maison (je rappelle que les habitantes des petites agglomérations sont victimes d'une inacceptable discrimination : aucune petite mercerie, si bien tenue soit elle, ne peut avoir en stock du passepoil tout fait... Il n'y a pas assez de demande, et un stock qui traine, c'est de l'argent qui dort), ce qui m'a imposé de revoir entièrement la patte de boutonnage. Ben oui, impossible de s'en tenir à un rabat de la bordure vers l'intérieur : où caser le passepoil dans cette configuration là ? Il a fallu envisager de rapporter une pièce sur le dessus sous laquelle glisser le passepoil en laissant déborder ce qui doit être vu... Cela implique des découpes en plus - toute seule - des coutures à multiples épaisseurs, de la fureur, du sang et des larmes.

Tout a commencé par une froide soirée de la fin décembre. Cela faisait des semaines que je la murissais, mon idée de chemise passepoilée... Je l'avais taillée et montée en entier plusieurs fois dans ma tête, j'avais imaginé des "trucs" infaillibles pour assurer un fini rapide et impeccable. A part  dix ans de muscu, dix autres de retraite dans un monastère shaolin avec voeu de silence et des heures à taper dans des quartier de boeuf au son de l'oeil du tigre, je ne vois pas ce que j'aurais pu faire de plus pour me sentir fin ready ! Ce soir là, donc, j'ai taillé le tissu après avoir demandé à mon coach perso, mon homme, si je me lançais ou pas... Forte de son "oui" appuyé, je m'étais précipitée sur les ciseaux... Le départ précipité du mari vers l'ordi (il ne m'avait même pas demandé de quoi je lui parlais, d'ailleurs...), tête baissée, escalier monté en trombe aurait dû me faire l'effet d'un mauvais présage. Mais bon, à ce stade, c'était :

Chemise : 0 - Laudette : 1

Et puis Noël s'est annoncé. Nous avons rejoint nos familles. Dans les sacs, des cadeaux, du papier-cadeau, et un peu de tissu. Mais la priorité était au gilet de ma belle-mère et à la tunique de BSB (je vous expliquerai, un jour, cherchez pas !). L'amorce de la chemise-boulet - pas encore révélée boulet à ce stade - était bien avec moi, mais je n'ai pas pu la sortir. Je me suis raconté que je n'avais pas le temps de m'y mettre. Faux. Je me suis dit qu'il me fallait me poser, chez moi, pour y travailler correctement. Pas tout à fait vrai... La vérité, c'est que la trouille commençait à monter. Et moi, la trouille, ça me paralyse, ça me fait reculer, ça me dissout... Qu'on ne vienne pas me parler de Shoot d'adrénaline qui vous rend plus vive, plus forte, plus efficace. Cela marchait peut-être sur les nageuses est-allemandes, mais pas sur moi qui suis un modèle plus ordinaire.

De retour à la maison, le travail m'a submergée, ce qui n'était pas tout à fait naturel dans la mesure où mon emploi du temps s'était sensiblement allégé, et où j'avais travaillé normalement durant mes congés (l'un des nombreux privilèges des enseignants, sans doute...) pour être à jour au retour. En fait, je reculais devant l'obstacle...

C'est là que mon cerveau s'est transformé en parc d'attraction pour disciple de Freud : d'abord, j'ai commencé par foirer des coutures simple, celle du dos, au niveau des fronces... Après une heure passée à positionner les pièces, j'ai cousu ça trop loin du bord du passepoil. La soirée a été occupée à défaire la chose, cousue direct à la surjeteuse, histoire de bien lester le rattage...

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A ce stade, les hostilités étaient inexorablement déclarées entre le passepoil et moi...

Chemise : 1 - Laudette : 0

J'ai trouvé le temps de trousser la poche poitrine. La MAC crie sa douleur : les épaisseurs lui déplaisent. Le coton (indigotex. Epuisé depuis longtemps) est dur à transpercer et avec le passepoil, cela fait une masse non négligeable et dense sous l'aiguille. Au final, ça passe...

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Péniblement, j'ai assemblé le dos et le devant en ma battant contre ce foutu passepoil qui avait décidé de me jouer des tours (gondoler, vriller, se vider de son cordon... j'en passe). Les manches m'angoissaient aussi... Il fallait les inventer en rallongeant, bidouillant un poignet... je voulais le border aussi de gris... Le temps passait, les demi-journées couture se trouvaient inexplicablement grignottées par une foule de trucs sortis de nulle part : rendez-vous Ubuesques à la banque (y aurait à dire...), courses injustifiées, réunions diverses...

Chemise : 1 - Laudette : 0,5

IMG_5814

Puis le jour est venu de m'atteler à la patte de boutonnage... C'était un mardi, jour de couture, puisque je suis libre, ce jour là, dès 13 h. Tout allait plutôt bien (j'avais monté un côté de la patte de boutonnage supérieure, celle qui se trouve sur le dessus et porte le passepoil) quand la vérité m'a sauté aux yeux : ça fronçait. J'ai bien essayé de tirer dessus (mais non, pas à la carabine ! Quoique l'envie était forte...), j'ai regardé ailleurs, plissé les yeux, envisagé de repasser la chose au fer brulant... Rien à faire. Le soir, j'ai tout défait.

Chemise : 1 - Laudette : 0

Dans la semaine, il m'a fallu me rendre à l'évidence... A couper mon passepoil comme une forcenée, je n'en avais plus assez pour finir : deux ou trois (ou quatre) coups de ciseau malheureux avaient eu raison du stock acheté en comptant large. Bref, je me rends à la mercerie (en contemplant au passage les vitrines dans lesquelles s'étalent des chemises en solde adorables et pas chères et FAITES...), achète mon biais en racontant mes malheurs, et rentre à la maison sans le cordon nécessaire pour changer le biais en passepoil. On est samedi soir. Je suis bloquée jusqu'au mardi suivant ! Qu'est-ce qu'il dirait Freud ? Acte manqué, c'est ça ? Ou comment s'éviter un échec en ne se présentant pas devant l'obstacle...

Chemise : 1 - Laudette : forfait

Cinq jours plus tard, je remets l'ouvrage sur le métier en alignant les motifs pour éviter toute fronce, prends soin de tenir le passepoil bien lache. Trois jours après cet effort suprême - et couronné de succès, enfin presque - je veux coudre le deuxième côté de la fameuse patte... et là, l'horreur. Ma MAC ne coud plus, ou plus exactement, elle ne fait plus des points, mais un fil tendu coulissant dans des boucles. Retentative, trois enfilages, cris, lamentations... me voilà chez Singer, où ma machine, sur un tissu lambda, se met à se comporter comme une élève modèle. Je prends un sermon gentil, j'ai dû mal enfiler, la canette devait être mal passée... c'est quand même pas plus mal que si c'était pire...

Je reviens à la maison et me remets à l'oeuvre, avec l'enfilage Singer, et aussitôt au contact de la chemise maudite, la Mac déraille. En fait, elle en a ras le bol, elle aussi, des pois verts sur fond gris, du passepoil, de mes mauvaises vibrations...

Chemise : 1 - Laudette : KO

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Mais il faut en finir. La machine, inexplicablement, accepte de fonctionner (en fait, nous nous sommes comprises) et je finis le devant. Je bidouille le bas des maches. La vie est belle... pour le moment.

Chemise : 0 - Laudette : 1

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Et vient le moment de poser le col. Taillé, précousu... il se révèle trop petit. Pourquoi ? Mystère... mais cela m'est déjà arrivé. Alors je recoupe, en mesurant à peu près. Inévitablement, dans la panique, je trace sur l'endroit... et couvre le col de crayon bleu ! Boulet, vous dites ? Oui... Bref, je monte le col gribouillé, aux épingles, sur le dos de Clothilde qui ne peste même pas lorsque je la pique... A 115 ans, elle est cool quand même ! Je triompherais presque s'il ne restait le plus désagréable pour la feignasse que je suis : coudre boutonnières et boutons. Qu'il faut acheter, les boutons, d'ailleurs !

Retour à la mercerie d'Ortholan où on me reçoit avec un petit air amusé... me demande bien pourquoi ! Je choisis triomphalement 6 boutons, que je couds...

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Rien ne vous étonne sur la photo ? Allez... les plus observatrices ont bien dû constater qu'il manque des boutons, en bas... Oui... j'en ai acheté 6... en oubliant qu'il en fallait aussi pour les poignets... que j'ai agrémentés en premier !

Chemise : 1 - Laudette : ras le bol !!!

Voilà toute l'histoire... ou comment j'ai tout fait pour me mettre des bâtons dans les roues afin de ne pas échouer dans la réalisation d'un ouvrage trop fort pour moi ! A ce stade, l'auto-sabordage serait presque un art...

Et sinon, la chemise ? Eh ben elle serait presque pas mal si le tissu n'était pas un peu trop rigide, la coupe un peu courte, un peu serrée aux épaules et un peu large du bas, les manches un peu courtes aussi, les boutons encore à la mercerie, les coutures inégales en qualité... A part ça, tout va bien !

Je vous gratifie d'ailleurs de quelques photos de plus, pour rentabiliser l'effort (peine perdue, à mon avis...), et je remercie les cops qui m'ont soutenue dans l'effort... parce que j'ai été coatchée, en plus, pour en arriver là...

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Commentaires
B
euh coucou, c'est encore moi... je galère toujours avec ma chemise comme le dit mon article et je viens à l'aide en te demandant de combien tu avais du agrandir ton col j'ai mis 8 cm de plus et c encore juste .... oups !!! amitiés
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B
Oh mon DIeu que je suis contente de te lire ....Je ne suis pas toute seule... en fait moi aussi, et comme tout le monde d'ailleurs à lire les commentaires, je bave devant cette Poule qui réussit tout ce qu'elle touche et en temps record... elle travaille cette bonne femme ? elle doit avoir une femme de ménage et une nounou non ?<br /> Enfin bref alors moi aussi j'ai acheté les SDB 1 et 3 et rêvait d'une chemise en LIberty Passepoilée... mais je n'ai jamais cousue de choses aussi compliquées... montage de col, boutonnière et passepoil... alors j'ai attaqué avec un tissu à 5 francs 6 sous et du biais en guise de passepoil... alors pour le moment j'ai qq coutures qui vrillent, du passepoil qui gondole, et je panique déjà pour les manches !!!! mais j'y arriverai même si je dois la portais gondolée !!!! hihihi encore merci à toi je repasserai !!!! bisous
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C
Eh oh ! Je mange PAS de surimi ! C'est dégueu ! Beurk ! Pouah ! (si un jour on m'avait dit qu'une boîte à lingettes m'entraînerait dans ce genre de discussion). <br /> <br /> Mais comme je vois que toi aussi, t'es une fille bien, je te pardonne. Et j'arrête de pourrir le blog, sinon, la proprio va encore gueuler.
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C
Ouh la la mais un accouchement, comparé à la conception de cette chemise, c'est de la gnognotte !!! <br /> Allez, la nature est bien faite et les hormones produites pdt l'accouchement te font oublier les douleurs !! Dans qq mois ou années tu seras motivée pour remettre le couvert et retoucher à du passepoil !! (à moins que t'es pas produit d'hormones pdt cette conception, là c'est plus génant....)<br /> Bon, et sinon, d'accord avec Caro (décidemment, elle est bien cette fille, à part qu'elle mange du surimi !), on les passe où les poils ??
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G
Eh bien j'arrive après tout le monde pour admirer le monstre vaincu par madame Laudette. Hourra ! Bon, madame Laudette a le nez qui brille et l'odeur du dessous de bras de chemise pas très heureuse après tant d'efforts, mais c'est ça aussi de foncer droit dans la tendance sans réfléchir ! La prochaine fois, tu choisiras la mode du mouchoir en Liberty, tu verras, on est encore entier à la fin. <br /> <br /> Enfin bravo tout de même d'avoir relevé le défi (à propos : vite vite, le défi 13 !), elle est très belle cette chemise ! D'ailleurs tu n'oublies pas de me mettre un petit passepoil sur ma blouse, hein ?
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Aux fils de Lau
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