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Aux fils de Lau
26 janvier 2011

Arrietty

Lorsque j'ai proposé à mon plus jeune fils d'aller voir Arrietty, c'était avec un sentiment mêlé... J'avais à la fois l'impression de me donner bonne conscience en payant de ma personne pour emmener le petit dernier voir le dessin animé indispensable, mais je ne pouvais me départir d'une drôle d'émotion ressentie devant le sujet du 13 h. qui annonçait la sortie du film.

Etait-ce l'image de Miyazaki passant le relais à son jeune disciple et le serrant dans se bras au terme du visionnage du film achevé, comme pour lui dire qu'il devenait un égal ? Etaient-ce les extraits, pourtant brefs ? Mystère...

Au sortir de la salle, j'étais émue et heureuse d'avoir vu, d'avoir suivi bien plus que l'adaptation d'un classique de la littérature anglaise par un maître (futur maître) du dessin animé japonais.

D'abord, le film est magnifique du fait de la richesse des décors. L'intérieur baroque et surchargé du logis des petits être, la famille d'Arrietty, tout en motifs floraux, en papiers peints assemblés, est saisissant comme un patchwork. Les objets y abondent, y disent le confort feutré de la maison de poupée au goût de bonbon anglais qui fait encore rêver bien des petites filles. La maison japonaise qui sert de décor à toute l'histoire, est, quant à elle, un merveille de précision et d'équilibre... Comment ne pas se sentir projetées dans ces intérieurs japonais que nous font entrevoir les livres de couture, références des JCA ? Etrangement, c'est dans un univers presque connu que je me suis vue entrer, dans un maison de la banlieue d'une ville japonaise que je ne connais pas, et qui m'était comme familière. Drôle de rêve éveillé...

Et puis ces petits êtres, ces humains miniature qui tissent dans les murs, sous les planchers, un réseau invisible et vivant, rassurant dans sa proximité avec notre monde, et magique du fait de leur différence d'échelle, qui ne les a pas rêvés dans l'enfance ? Avant de peupler Arrietty, c'est notre âme d'enfant qu'ils ont habitée, et les voilà ressurgis, tels qu'en eux mêmes, sortes de poupées animées, aimables et farouches, garantes de ce que nos rêves n'étaient pas que des illusions, puisque leur peuple, on nous en assure, tient à ne pas être vu, mais peut être entre-aperçu...

Et puis Arrietty n'est pas qu'une histoire. Sa fin ouverte sera sans doute une contrariété pour les esprits chagrins. D'aucuns prétendront même qu'il n'y a pas de fin. Quelle erreur ! Oui, Arrietty part, et nous ne savons pas où, et nous ne savons pas ce que sera sa vie d'après... et alors ? Faut-il qu'un film nous dise tout ? L'essentiel n'a-t-il pas eu lieu, le miracle de la rencontre improbable ?

Dans ce film, Arrietty commet une erreur, elle transgresse, et toute transgression se paie. C'est peut-être cela, l'histoire... Mais la transgression, c'est aussi ce qui nous rend vivants, ce qui nous fait sortir de nous mêmes. Rencontrer le petit garçon malade est un choix, lui parler, se montrer à lui est radical. Cela modifiera le destin de l'héroïne, et il n'y aura pas d'issue heureuse en forme de "happy end" mièvre et rassurant. On paie le prix de ses actes, mais cela en vaut parfois la peine. Arrietty est allée au bout de son désir, elle en assume les conséquences, et elle a eu raison. C'est peut-être là, aussi, un film sur l'acceptation des règles, et qui donne au si galvaudé verbe "assumer" tout son sens.

Rendue à la raison, Arrietty fuit avec ses parents, et cet autre être minuscule, frustre et maladroit qui les aide et qui, tout nous le fait deviner, sera pour elle le seul parti possible. Ce futur se dessine, et il n'a rien d'effrayant, parce qu'il est logique, et d'autant mieux accepté qu'Arrietty a aimé et renoncé librement.

Ne nous y trompons pas, c'est une histoire d'amour que raconte le film, entre la chapardeuse et le jeune humain qu'elle rencontre et qui la tient dans sa main. Le motif du voile derrière lequel se cache Arrietty (mouchoir, feuille,...) dit la pudeur et le désir. Ces cheveux qu'elle attache, dénoue, soupèse, n'ont rien d'anodin. Ils sont une image de sa liberté et de sa sensualité à peine entrevue, à l'âge où l'on quitte l'enfance, comme est aussi un symbole le cadeau d'adieu, le don de la pince à cheveux à l'être aimé que l'on quitte parce que rien d'autre n'est possible et que la vie le veut ainsi.

Peut-être Arrietty est-il le meilleur moyen qui soit à portée de main en ce moment  pour parler aux enfants d'amour, de sensualité et de raison...

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Commentaires
C
En ballade flottante sur le net, je découvre ta note sur Arrietty et je ne résiste pas à l'envie te remercier pour ta lecture du film. Tu as su mettre en mots sensibles sa magie. C'est un magnifique conte initiatique qui laisse une empreinte. Et te lire m'a permis de la raviver. Merci encore.
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C
ca me donne e vie de le voir.... moi j'ai adoré Ponyo
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M
trop cool, mes comm ont été postés<br /> dis je viens du 3 au 10 mars, j'espre avoir de bonheur de te voir, et va savoir de se faire une toile, bises
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M
t'analyses bien quand même, c'est quoi déjà ton métier? mais c'est vrai que je suis sortie de la projection avec le sourire..
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M
mouais en un mot BIEN, il est bien ce film!!!! et j'adore la maison de poupée dedans
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